Écrire sans faiblir

Écrire un roman puis un autre puis un autre nécessite de travailler (oui !). Sans faiblir. Je ne sais plus quel écrivain (Philippe Jaeneda peut-être) cachait le câble de sa box sous le matelas du lit conjugal pour écrire toute la nuit sans avoir la tentation de se connecter.

Pour aider mon propre surmoi, je viens d’essayer quelques outils anti-distraction (trouvés évidemment durant des pauses procrastination sur le web). Deux outils pour couper internet – Antisocial et Freedom –  et deux éditeurs (très tendance semble-t-il chez les nanowriters) pour se concentrer sur son texte, Byword et OmmWriter.

The procrastination demon, Fergus Ray Murray - Licence CC BY-NC-SA - http://www.flickr.com/photos/0olong/135489680/
The procrastination demon, Fergus Ray Murray – Licence CC BY-NC-SA – http://www.flickr.com/photos/0olong/135489680/

Antisocial : débrancher les réseaux sociaux et la messagerie et et et…

AntisocialPour couper Facebook, Twitter, Gmail, etc. tout en restant connecté à internet pour accéder à tout ce dont on peut avoir besoin en ligne (doc, dicos, Wikipedia, StreetView, etc.), un outil : Antisocial (sic !).

Vous lui donnez la durée de coupure, vous rajoutez éventuelles d’autres sites que vous voulez bannir, vous choisissez avec ou sans messagerie, et c’est parti, ici pour deux heures et demi.

La seule solution pour le contourner est de redémarrer son ordinateur.

C’est sur Mac et ça coûte dans les 10€. Vous trouverez des logiciels Windows équivalents.

Freedom : couper Internet aussi sur son smartphone (et sur tablette, alouette !)

Le smartphone aussi est source de nuisance. Messagerie, réseaux sociaux… Pour couper tout ça tout en restant joignable au téléphone, j’ai essayé sur Androïd Freedom (re sic !). Vous décidez si vous coupez seulement le wifi, seulement la 3G, etc. Coupez tout ça ! C’est ici sur Google Play et ça coûte 3,69€ (pas de version gratuite avec pub).

Byword ou OmmWriter : se concentrer sur son texte

Byword affiche un plein écran noir ou blanc, permet de régler la position et les dimensions de la zone d’écriture, d’atténuer le texte sauf le paragraphe ou la ligne en cours d’écriture. Pas de style, de règles, de puces, d’impression, juste italiques, gras et sauvegarde RTF. Le minimal. Ah si, un truc, tout de même, pour checker, comme on dit aujourd’hui, le travail abattu sans mail ni réseaux sociaux : l’affichage du nombre de mots et de signes. Prix, 9,99$ sur Mac, iPad, iPhone.

OmmWriter lui est sur la même ligne dépouillée mais avec choix d’ambiances sonores (il y en a 7), de fonds zen (la mer, paysage neigeux…), et de sonorisation de votre frappe (manque l’Underwood). Vous choisissez vous-même le prix. Le site conseille 4,11$. Ça vaut plus, franchement. Ça marche sur PC, iPad et Mac.

J’avais des doutes sur les fonds sonores de OmmWriter. En fait, cela accélère la coupure avec le monde extérieur. Je retrouve bien plus vite le fil de l’écriture après l’avoir quitté (le fond sonore se coupe si on bascule dans un autre logiciel). En plus de l’isolement, il doit y avoir un conditionnement créé par l’accoutumance. C’est tout de même barbant à la longue, j’alterne en ce moment avec Tristesse contemporaine et https://soundcloud.com/nytaofficial

 

Quelques autres avis sur la question

Mon amie Martine vient de proposer quelques réflexions judicieuses pour écrire davantage, à condition de les appliquer, bien sûr.

John August, le superman médiatique de l’écriture de scénario et prolixe de making off, en donne dans un de ses billets, Writing process.

Et pour finir, l’avis d’un grand bosseur, le King :

« Dans une de mes premières interviews (je crois que c’était pour la promotion de Carrie), le présentateur d’une émission de radio me demanda comment j’écrivais. Ma réponse – « Un mot à la fois » – le laissa, selon toute apparence, sans voix. Je crois qu’il se demandait si j’étais sérieux ou si je plaisantais. J’étais sérieux. En fin de compte, tout revient à ça. »

Stephen King, Écriture

Où nos ombres s’épousent, Stéphane Bataillon

Il l’a perdue, il lui a écrit des poèmes. À qui écrit-on lorsqu’on s’adresse à celle ou celui qui est parti ? C’est le premier recueil de Stéphane Bataillon. Une langue simple. Celle de nous tous. Aucun cri. La peine bordée. Juste parfois quelques clichés poétiques, un maréchal-ferrant, une meute, une flamme de bougie, mais je suis rarement bon public. Ce recueil caresse d’une main attentive ce sujet si souvent abordé.

Je n’ai pas la douleur

Je n’ai pas le besoin

et je n’ai pas l’exil

J’ai juste perdu

celle que j’aimais.

page 11,

et

Bien sûr, l’asphyxie

Bien sûr, le pourquoi

crier sans voix au fond de l’ombre

Mais quelque chose

qui nous dit d’attendre

Que nous devrons nommer

Quelque chose de simple.

page 17, et encore

Conserver seulement

ce qui est nécessaire

Ne garder que les mots

et puis les écouter.

page 25, et enfin, sur une touche romantique, page 69

Une étendue de sable

La mer au loin. Du vent.

L’image se brouille

Tu te penches pour ramasser

un galet, puis deux

Tu récoltes avec soin

ces vieux témoins du monde

Comme s’ils pouvaient se fendre

et comme si ta chaleur

assurait leur survie

Tu me dis :

«C’est important, les galets »

Tu es belle.

Où nos ombres s’épousent, Stéphane Bataillon, éd. Bruno Doucey, 93 pages, 10€

Le site de Stéphane Bataillon : www.stephanebataillon.com