Ma nouvelle Ratabougo vient de sortir à L’ourse Brune, avec en couverture un papier chinois de l’artiste Louis-Marie Catta. Elle est accompagnée de trois autres livres de ce nouvel éditeur qui se spécialise dans la nouvelle, un genre merveilleux, où en 40 50 pages et moins d’une heure on embarque lectrices et lecteurs dans une histoire forte, avec deux trois personnages qui vont à l’essentiel des sentiments, des passions. Je n’en dirai pas plus que dans la vidéo ci-dessous, sauf qu’il s’agit d’une question que chacun de nous a à régler au moins une fois dans sa vie, sinon deux. Une question qui tient en un mot pour les deux héros de cette histoire, « Ratabougo ».
Vidéo de présentation
Les autres livres publiés par L’Ourse Brune
L’Ourse Brune a été créée cette année 2020, avec 4 titres à son catalogue. Voici les 3 autres :
Ma bonne Marguerite, Jacqueline Dewerdt-Ogil
L’émigrante, Marie-Claude Viano
Portrait en bleu, Ève Roland
Librairies où trouver Ratabougo et les autres livres de l’Ourse
Les livres de l’Ourse Brune sont commandables dans toutes les librairies de France. Ils sont référencés dans Électre.
Ils sont en rayon ici :
Paris
Librairie Vocabulaire, 39 Boulevard de Port-Royal, 13e
Librairie Le pied à terre, 9 rue Custine, 18e
Avranches
Librairie Mille et une pages — Click and collect
Granville
Librairie L’Encre bleue — Click and collect
Librairie Le détour
Librairie Le détour, Granville
Acheter Ratabougo par Internet
Vous pouvez commander Ratabougo sur Internet avec un paiement sécurisé HelloAsso (banque Crédit Mutuel) ici :
Hubert Mingarelli est décédé aujourd’hui, 27 janvier 2020. La lecture de son premier roman paru en 1999 dans une collection hors jeunesse, Une rivière verte et silencieuse, m’avait marqué. J’avais eu l’occasion de l’interviewer pour l’hebdo culturel Le Petit Bulletin et, en 2004, de chroniquer un autre de ses livres, La dernière neige, dans Plumart, un journal culturel lyonnais en ligne.
Je republie ci-dessous cette interview (merci au Petit Bulletin) et cette chronique.
Hubert Mingarelli au cours d’un petit-déjeuner littéraire dans le cadre du 20e Festival international de géographie à Saint-Dié-des-Vosges — Photo (recadrée) de Ji-Elle, CC BY-SA-3.0
Cette herbe poussait si vite que personne ne jugeait utile de couper une herbe qui aurait repoussé le lendemain. Elle commençait derrière les maisons et, me semblait-il, s’étendait aussi loin que la vue portait depuis le sommet du château d’eau. Mais je ne pouvais pas l’affirmer, car je n’étais jamais monté sur le château d’eau.
C’était une herbe mystérieuse.
Je pouvais marcher une heure sans rencontrer autre chose que ces herbes qui me dépassaient d’un demi mètre en hauteur, mais laissaient entrer la lumière du soleil, de sorte qu’il n’y avait rien d’effrayant à y marcher, même sur un kilomètre à l’intérieur.
Une rivière verte et silencieuse, Hubert Mingarelli, éd. du Seuil, 1999
Interview de Hubert Mingarelli en 1999
Interview parue dans Le Petit Bulletin de Grenoble à l’occasion de la sortie d’Une rivière verte et silencieuse.
Hubert Mingarelli est l’auteur d’un premier roman très remarqué (et très beau), Une rivière verte et silencieuse (éd. du Seuil). Ses livres précédents ont été édités dans des collections destinées aux jeunes. Il vit dans un hameau près de La Mure.
Vous avez pas
mal bourlingué avant d’écrire. Pourquoi ?
Je me suis engagé à 17 ans dans la marine pour échapper à la vie d’usine et à la Lorraine. Cela a été trois années de galère terribles moralement mais qui m’ont permis de savoir ce dont je ne voulais, les gens avec qui je ne voulais pas être. Ensuite durant un an, ça a été la pure aventure dans toute l’Europe avec deux copains à vélo. Nous vivions de la musique que nous faisions. Ensuite j’ai fait plein de petits boulots, durant presque vingt ans. Cela a duré jusqu’à il y a deux ans. Je faisais de l’alimentaire pour avoir le maximum de temps pour créer. Je savais depuis le début de l’adolescence ce que je voulais faire, que je ne serais heureux qu’en faisant des choses venant uniquement de moi, et l’art permet cela.
Votre roman est
un dialogue père/fils, sans mère, où rien n’est dit directement. C’est une voie
assez peu explorée ces temps-ci en littérature française.
Ce que fait le
père dans le roman est une métaphore de tout ce que j’ai voulu faire dans la
vie, il plante des rosiers, il va de boulot en boulot. Un critique a dit que le
tunnel d’herbe où marche le fils représente le cocon maternel, cela m’a plu
mais j’essaie de ne pas trop creuser. Je fais confiance à l’intelligence du
lecteur quand j’écris, je me donne beaucoup de mal, j’ai envie qu’il
s’implique, qu’il fasse lui aussi beaucoup dans la lecture.
Vous écrivez
depuis dix ans. Que représente ce début de succès représente pour vous ?
C’est vachement
important. Si j’écris c’est pour que l’on aime ce que je fais. J’ai toujours eu
une bonne critique pour mes livres précédents, cela m’a beaucoup aidé et m’a
permis d’évoluer, de prendre des risques en écriture. Tout le monde peut
raconter une bonne histoire, ce qui fait la différence, c’est la technique,
quand un livre est bien écrit, quand il est honnête, quand il ne sent ni
l’effort, ni la fabrique. Comme les écrivains que j’aime, London, Kerouac,
Brautigan, Fante, Carver, Bukowski. Entre ce qu’ils ont écrit et ce qu’ils ont
vécu, il y a un rapport étroit, il y a de la chair. Une œuvre ça vient de soi,
sinon on est dans le consensus. Les bons livres, c’est toujours
autobiographique.
Propos recueillis pour le Petit Bulletin par Gilles Bertin
La dernière neige
Il y a de petits livres comme ça… comme Le vieil homme et la mer… des petits livres où deux hommes, un qui commence sa vie, un qui la termine, se confrontent à l’essence du monde. Un espadon et un milan. L’océan et la montagne. Hemingway Mingarelli, la comparaison est légitime. De livre en livre, Hubert Mingarelli épure, dépouille, essenciellise, ne laisse à ses personnages que leurs pieds, leurs mains et quelques paroles. Leurs pieds dans ces chaussures qu’ils cirent parce qu’ils savent que ce cuir doit être protégé, qu’il est essentiel. Leurs mains qui ne se touchent pas. Qui ne manipulent plus que l’essentiel. Un peu d’argent. De la nourriture. Leurs paroles sont rares. Ils marchent dans des étendues sans fin. Prairies de ce magnifique Une rivière verte et silencieuse. Neige uniquement tachée par les plaques bleues des mares gelées de La dernière neige. Les personnages de Mingarelli ne se parlent qu’à travers des histoires d’animaux ou d’objets, des histoires d’hommes. Un fils et son père. Le père à un bout de la vie, sans ressources dans Une rivière verte et silencieuse. Cloué au lit, proche de la mort dans La dernière neige. Et c’est le fils qui va au monde. Qui veut ce milan dans sa cage. Qui le rapporte au père. Qui fait de lui cet homme qui a un fils. Mingarelli n’en sait pas plus. Il n’a pas de théorie, pas de morale, pas d’introspection. Il écrit des histoires, vraies. Il les commence avec ce fils et son père. Ce fils qui marche. Ce père sur son lit de mort. Et nous allons ensemble, lecteur et écrivain, au bout du livre avec ces deux hommes, comme nous allons dans nos vies entre notre père et notre fils. Et qu’en dire d’autre que c’est peut-être ça qu’un père attend pour partir, que son fils aille au monde et qu’il lui ramène encore une fois.