Israël Horovitz, Courtes pièces inédites — Avignon 2015

Israel Horovitz pièces courtes

Quatre pièces inédites courtes d’Israël Horovitz à Avignon, au Théâtre du Verbe Fou, jusqu’au 26 juillet. Format idéal pour le découvrir, c’était mon cas ce matin, rendez-vous depuis longtemps remis. Une très vieille femme cherche son chat dans Cat Lady. Comme lui, elle a eu au moins neuf vies. Son premier mariage à 16 ans et son enfant mort-né. Mariage annulé. C’est la propre histoire quasiment de Horovitz telle qu’il la raconte à propos d’une autre pièce courte — La Marelle — dans la préface de Dix pièces courtes :

J’avais 17 ans ma petite amie qui en avait alors 16 est tombée enceinte. Nous avons demandé conseil à nos parents. Dans la semaine qui suivit, ils ont organisé une cérémonie de rabbi et de noces. Six mois plus tard, le bébé est né avec une malformation des poumons. L’enfant a lutté durant 11 jours avant de mourir. Nos parents ont acheté un petit cercueil en béton et ont arrangé son enterrement dans une tombe sans inscription. J’ai senti que beaucoup d’adultes autour de nous était d’une certaine façon soulagés de voir le pêché effacé. Nous sommes restés mariés pendant quelques mois, sans savoir pourquoi ni l’un ni l’autre. Une nuit, nous avons fait chambre à part. […] Mon père, alors jeune avocat enthousiaste, arrangea l’annulation de notre mariage. Qu’est-ce que ça veut dire ? j’ai demandé. Mon père m’expliqua que l’annulation était une manière légale d’effacer le mariage des livres officiels comme s’il n’avait jamais eu lieu. Le mariage disparut… simplement, rapidement, légalement. Avant ce tour de magie, je ne me souviens pas d’avoir discuté de cette affaire avec mon père. L’écriture de La Marelle était une façon pour moi de réinscrire ce mariage dans les livres officiels. Ainsi, La Marelle résonne comme quelque chose de terriblement vrai. Et oui, je sais que c’est affreux cette manière nous nous, les artistes, nous prenons des événements de nos vies, nous les blanchissons, les reformons ; comme les étendons aux regards de tous sur des fils ô combien publics.

Extrait de la préface de Dix pièces courtes

Cette très vieille dame aura comme son chat égaré de nombreuses autres vies dont une au moins très réussie. Comme l’interprétation de Marie-Gaëlle Janssens-Casteels au service de l’humour, de la vacherie et de la tendresse d’Horovitz. Impossible d’en dire plus de l’histoire sans la spoiler. Par contre, il est possible de dire la féroce énergie qui se dégage de cette vieille femme à la recherche de ce chat si têtu, si déterminé à vivre sa propre vie, lui aussi.

Dans Le cadeau promotionnel, une jeune femme (Laurence Briand) semble être venue vendre une assurance–vie à une bourgeoise (Marie-Gaëlle Janssens-Casteels) d’un quartier résidentiel de New–York. Son mari est mort. Ils avaient adopté un enfant. Les deux femmes font connaissance prudemment. On devine qu’il ne s’agit pas d’assurance–vie. Un spectaculaire rebondissement au milieu de la pièce remet tout en question entre elles. Comme dans la pièce précédente, il est question de vie. De naissance. De maternité, de paternité. De quoi nourrissons-nous nos vies ? d’autres vies ? Horovitz parle du temps, de la vie. Surtout du temps de la vie. En mettant une loupe aux endroits essentiels. Confrontation de deux femmes autour d’un enfant à travers ces deux actrices.

La mise en scène de Bernard Lefrancq est simple et efficace, sans gras, comme l’écriture de Horovitz. Avec des actrices qui tracent des rosaces invisibles sur la scène, enchevêtrées et brillantes comme des traces d’escargot. Marie-Gaëlle Janssens-Casteels et Laurence Briand jouent très bien. Il reste jusqu’à dimanche pour les voir dans ces pièces et découvrir ces textes inédits d’Israël Horovitz. Avec en prime quelques uns de ces poèmes.


Infos pratiques : tous les jours à 10h45 jusqu’au 26 juillet, Théâtre Le verbe fou par la compagnie du même nom, 95 rue des Infirmières, Avignon — Réservation : 04 90 85 29 90 — 20 € Plein Tarif – 14 € Tarif carte off – Site web : Le verbe fou Festival 2015

Dix pièces courtes, Israël Horovitz, éd. Théâtrales, 288 pages, ISBN 978-2-84260-249-9 — Prix, 22,5€ — Nota : les 4 pièces inédites jouées ici ne figurent pas dans ce recueil.

Publié par

Gilles Bertin

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Une réflexion sur « Israël Horovitz, Courtes pièces inédites — Avignon 2015 »

  1. Très intéressante cette note de présentation,
    Espérons que le spectacle sera programmé dans de nombreuses villes de France et de Navarre

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