Une minute encore

Un homme court sur un tapis roulant d’entraînement. Son staccato évoque celui des rails des trains de déportés qui convergent de toute l’Europe vers l’Allemagne. Sa course, la course incessante des prisonniers, fouettés par les SS. Sa performance athlétique les théories nazies sur la culture physique. En courant, cet homme, l’acteur et metteur en scène Thomas Germaine, dit un montage d’extraits des textes de Charlotte Delbo, l’une des 230 femmes qui dans le convoi du 24 janvier 1943 part pour Auschwitz. Les textes de Charlotte Delbo constituent une trilogie Auschwitz et après éditée chez Minuit.
Cette course sur ce tapis si moderne, emblématique de notre société qui, elle aussi, voue un culte au corps, par ce jeune homme en pleine santé est un magnifique travail d’acteur, de mise en scène, de théâtre qui sert le texte de Charlotte Delbo vibrant de vie, d’humanité, d’espoir, de révolte tendue vers nous – lecteurs et spectateurs – avec justesse, sans pathos.
Si vous avez la chance et le privilège de pouvoir aller au festival d’Avignon cette année, allez voir ce spectacle. Il est bouleversant.

Infos pratiques :

  • Tous les jours du 7 au 27 juillet à 14h20 sauf les 8, 12, 15, 22 et 26 où le film Le Convoi du 24 janvier 1943 est projeté
  • La Manufacture – Réservations : 04 90 85 12 71

11 réflexions au sujet de « Une minute encore »

  1. Le texte, la mise en scène, les propos de Thomas Germaine sont plus que bouleversants…
    Le silence me semble être le meilleur commentaire.

  2. @Epamin’, oui, effectivement, laisser toute sa place à ce texte.
    @arf: le choix de cette course par le metteur en scène est une idée très forte.
    @Kouki, autre pièce à voir absolument : « Les déplacés » de Xavier Durringer. Son écriture est encore plus efficace que d’habitude et il est servi par 3 acteurs ex-tra-or-di-nai-res. Grosse bouffée d’émotion théâtrale et surtout humaine. C’est un tout petit théâtre : « Atelier Porte théâtre Saint Lazare »
    Réservations : 06 86 97 16 63
    Leur site : http://www.theatre-uvol.com/

  3. Je viens de transmettre à un couple d’amis qui partent pour Avignon. Quelle chance vous avez ! C’est un sectacle que j’aurais voulu voir et qui me rappelle un texte similaire sur la soif, entendu il y a des années sur une scène où un acteur tordu par la maladie, finissait par cette phrase que je n’ai jamais oublié : « Il y a des gens, quand ils ont soif, ils entrent dans un café et ils commandent une bière ».

  4. Oui, c’est une grande chance. Je viens de lire dans un journal sous la plume d’un critique qu’il trouve que c’est une « foire »….. « On ne fait pas boire un âne qui n’a pas plus soif ! » Moi, j’ai encore soif.

  5. Je suis allée le voir le 18 juillet à la Manufacture.
    Bouleversant c’est le mot.
    J’avais déjà lu les oeuvres de Charlotte Delbo, qui m’avaient déjà émue. Mais cette performance là..J’ai versé quelques larmes au début et beaucoup à la fin. La puissance des mots associée à cette course, c’était saisissant. Thomas Germaine était parfait. Et à la lumière revenue, j’aurai voulu qu’on me laisse « une minute encore » pour apprécier, pleurer, cette demande impérieuse de vivre. J’aurai voulu le rencontrer pour lui dire tout cela.
    Alors s’il ne sait pas, vous qui lisez mes mots, n’hésitez pas.

  6. Oui, Symbelmyna, le final, ou Charlotte Delbo s’adresse à nous, en nous demandant de vivre notre vie comme ces femmes qui n’ont pu vivre la leur est saisissant. Thomas Germaine est parfait (oui, c’est une performance !), j’espère que cette pièce va continuer à être jouée. Elle fait partie des oeuvres qui s’impriment en soi pour toujours, comme le livre de Robert Antelme.

  7. Merci pour vos commentaires. Merci Encore.
    La tournée vient de s’achever. Elle reprendra dès le mois d’octobre 2011 pour une vingtaine de dates. Et j’espère plus… encore.

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